Tu te souviens peut être, Thierry, de mon influence d’Arthur Schopenhauer et celle tout aussi forte de Paul Watzlawick, père du constructivisme. Le premier disait que "la réalité est un objet pour un sujet qui le regarde. Que le sujet s'éloigne, l'objet disparaît". Le second disait que la réalité n'est que la conscience que nous avons du réel. J'ai eu comme professeur, dans le temps Serge Moscovici, le père de Pierre, qui a eu cette phrase devenue célèbre et célébrée par Alain Touraine : "Les lois de la nature sont celle que la culture lui trouve".
Tout ceci pour redire ce qui m'occupe : quoi qu'il en soit, quoi que l'on y fasse, quelle que soit notre intention profonde, notre éthique et nos résolutions, la réalité qui nous occupe n'est qu'une construction pour soi, construite entre nous sur des références communément élaborées, partagées et reconduites.
Quoi que pensent les chirurgiens fous, ils ne le sont pas plus que nous et nous sommes, comme eux, victimes de ce que quelques psychanalystes appèlent "le délire humain", une élaboration symbolique du réel.
On suppose que le monde se donnera à voir dans sa "réalité" mais il n'y a pas d'autre réalité que cette conscience construite et co-construite.
Il m'arrive de dire que l'on pense approcher la connaissance du monde comme on lit "Le Monde". Mais le monde ne se donne pas à voir, nous le regardons depuis nos croyances et nos préoccupations et ce va et vient entre l'expérimentation du réel et notre "critérium", comme le nommait Schopenhauer, élabore un changement de nos représentations.
Oui, c'est vache et pessimiste en apparence, mais je crois bien que c'est comme ça.
Et donc de dire qu'in fine, nous ne sommes pas si différents de ces chirurgiens fous... rien ne nous garantie de rien, surtout pas le réel dont Lacan disait qu’on ne faisait rien et ne pouvions rien faire…
Je sais que ce n'est pas cela que tu as à l'esprit, mais le fait que nous n'ayons tous que des représentations du monde ne permet pas de verser dans un relativisme où tout serait égal. Mais c'est un registre particulier de représentation que d'élaborer des théories ou des modèles de la réalité et d'en oublier les signaux qui nous arrivent en retour. La chienne crie, le bébé pleure, le peuple chilien de Pinochet meurt de faim, il faut accumuler des millions de morts pour accéder au bonheur du Grand Soir. Si nous sommes tous fous, il y a des degrés dans la folie et il y a des doux dingues et des fous furieux.
2 commentaires
Tu te souviens peut être, Thierry, de mon influence d’Arthur Schopenhauer et celle tout aussi forte de Paul Watzlawick, père du constructivisme. Le premier disait que "la réalité est un objet pour un sujet qui le regarde. Que le sujet s'éloigne, l'objet disparaît". Le second disait que la réalité n'est que la conscience que nous avons du réel. J'ai eu comme professeur, dans le temps Serge Moscovici, le père de Pierre, qui a eu cette phrase devenue célèbre et célébrée par Alain Touraine : "Les lois de la nature sont celle que la culture lui trouve".
Tout ceci pour redire ce qui m'occupe : quoi qu'il en soit, quoi que l'on y fasse, quelle que soit notre intention profonde, notre éthique et nos résolutions, la réalité qui nous occupe n'est qu'une construction pour soi, construite entre nous sur des références communément élaborées, partagées et reconduites.
Quoi que pensent les chirurgiens fous, ils ne le sont pas plus que nous et nous sommes, comme eux, victimes de ce que quelques psychanalystes appèlent "le délire humain", une élaboration symbolique du réel.
On suppose que le monde se donnera à voir dans sa "réalité" mais il n'y a pas d'autre réalité que cette conscience construite et co-construite.
Il m'arrive de dire que l'on pense approcher la connaissance du monde comme on lit "Le Monde". Mais le monde ne se donne pas à voir, nous le regardons depuis nos croyances et nos préoccupations et ce va et vient entre l'expérimentation du réel et notre "critérium", comme le nommait Schopenhauer, élabore un changement de nos représentations.
Oui, c'est vache et pessimiste en apparence, mais je crois bien que c'est comme ça.
Et donc de dire qu'in fine, nous ne sommes pas si différents de ces chirurgiens fous... rien ne nous garantie de rien, surtout pas le réel dont Lacan disait qu’on ne faisait rien et ne pouvions rien faire…
Je sais que ce n'est pas cela que tu as à l'esprit, mais le fait que nous n'ayons tous que des représentations du monde ne permet pas de verser dans un relativisme où tout serait égal. Mais c'est un registre particulier de représentation que d'élaborer des théories ou des modèles de la réalité et d'en oublier les signaux qui nous arrivent en retour. La chienne crie, le bébé pleure, le peuple chilien de Pinochet meurt de faim, il faut accumuler des millions de morts pour accéder au bonheur du Grand Soir. Si nous sommes tous fous, il y a des degrés dans la folie et il y a des doux dingues et des fous furieux.
Les commentaires sont fermés.