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16/04/2008

Au pilori

 

 

Cette note figure désormais dans le recueil

Les ombres de la caverne

Editions Hermann, juillet 2011

Commentaires

J'ai vu hier soir (et je recommande vivement) le film "Into The Wild" sur grand écran; le personnage principal y lisait Tolstoï, en plus de Thoreau "le marcheur", et d'autres auteurs qu'il convient de relire aujourd'hui pour changer nos perspectives ...

Dans un registre moins dramatique, cela me rappelle l'histoire bien connue du pêcheur mexicain, dont je recommande la (re)lecture une fois par semaine (c'est un rite comme un autre ...)

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Au bord de l'eau dans un petit village côtier mexicain. Un bateau rentre au port, contenant plusieurs thons. Un nord-américain complimente le pécheur mexicain sur la qualité de ses poissons et lui demande combien de temps il lui a fallu pour les capturer.

Pas très longtemps, répond le Mexicain. Mais alors, pourquoi n'êtes-vous pas resté en mer plus longtemps pour en attraper plus ? demande l'américain. Le Mexicain répond que ces quelques poissons suffiront a subvenir aux besoins de sa famille.

L'américain demande alors : « Mais que faites-vous le reste du temps » ? « Je fais la grasse matinée, je pêche un peu, je joue avec mes enfants, je fais la sieste avec ma femme. Le soir je vais au village voir mes amis. Nous buvons du vin et jouons de la guitare. J'ai une vie bien remplie » répond le mexicain.

L'américain l'interrompt : J'ai un MBA de l'université de Harvard et je peux vous aider.Vous devriez commencer par pêcher plus longtemps. Avec les bénéfices dégagés, vous pourriez acheter un plus gros bateau. Avec l'argent que vous rapporterait ce bateau, vous pourriez en acheter un deuxième et ainsi de suite jusqu'a ce que vous possédiez une flotte de chalutiers. Au lieu de vendre vos poissons à un intermédiaire, vous pourriez négocier directement avec l'usine, et même ouvrir votre propre usine. Vous pourriez alors quitter votre petit village pour Mexico City, Los Angeles, puis peut être New York, d'ou vous dirigeriez toutes vos affaires.

Le Mexicain demande alors : « Combien de temps cela prendrait-il » ? –15 à 20 ans, répond le banquier. Et après ? – Après, c'est la que ça devient intéressant, répond l'Américain en riant.Quand le moment sera venu, vous pourrez introduire votre société en bourse et vous gagnerez des millions. – Des millions ? Mais après ?

– Après, vous pourrez prendre votre retraite, habiter dans un petit village côtier, faire la grasse matinée, jouer avec vos enfants, pêcher un peu, faire la sieste avec votre femme, et passer vos soirées a boire et à jouer de la guitare avec vos amis...

Écrit par : Pierre C. | 16/04/2008

Le noir ne porte pas mon regard. De l'ombre et lumière, se détache ce qui fait le monde. Alors, je vis.

Écrit par : swimmer21 | 16/04/2008

Tout ceci me fait souvenir d'Adrien Monmayou, paysan rustre et quasi illettré, ami de mon père, qui, alors que j'étais gamin, faisait mon admiration. En 1974, voyant sa vielle torpédo garée dans l'herbe assez loin de la maison, je l’interrogeais sur ce stationnement inhabituel. Il me répondit :"Viens voir... J'ai acheté une voiture neuve !" Je le suivais perplexe. Il ouvrit la porte du hangar qui lui servait de garage e et dedans je vis... une 203...
Adrien Monmayou était un sage comme on se les représentait encore à cette époque, quelqu'un forgé à l'aune de l'expérience et de la résolution quotidienne des milles et une choses de la vie. Il fabriquait ses outils, avait toute sorte de matériel hérité et améliorés faisant office d'étaux, de presse, d'établit, de poussoir, etc... avec lesquels il fabriquait tous les instruments possibles et inimaginables utiles à réparer une porte, une chaussure, une fourche, un râteau, le sabot d'une vache, la meule à aiguiser, etc...
Les sociologues diraient que Adrien Monmayou passait son temps à organiser son processus vital. Lentement posément il s'occupait du développement des sa vigne de chasselas, des 4 ou 5 vaches qui elles même tiraient socs et charrues, de son cheval, de ses poules, de ses pigeons, de son lopin de blé, etc...
Il avait une telle connaissance de son environnement que l'une de mes soeurs avait révisé la botanique pour son agrégation de sciences naturelle en se promenant avec lui dans la campagne. "Et comment tu l'appelle, celle-ci ?" demandait il en montrant un brin d'herbe. Ma soeur récitait sa partie et il ajoutait le nom occitan indiquant à quoi elle servait. "Celle-ci enlève les verrues, et dans la lessive elle blanchie le linge..." Il est mort avec sa science...
Un jour il me dit, alors que nous partagions sa soupe épaisse, "Ils ont fait des spoutniks pour aller sur la lune mais ils ne sont pas foutus de faire la carafe qui ne fait pas la goutte..." cette goutte qui imperturbablement vient tacher la nappe quand on repose le pichet...
J'ai l'impression qu'en 40 ans, nous avons quitté le monde "inscrit dans une histoire" pour un monde immédiat, inconséquent où la place de la personne n'est plus celle du sujet mais du consommateur et de la victime (je me réfère aux travaux de Le Goff). Nous étions dans une nature, nous sommes dans une sorte d'immense supermarché...

Écrit par : Jean-Marc SAURET | 16/04/2008

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