08/02/2009
Solublèmes
Extrait du blog de Paul Jorion, en date du 7 février, sous la signature de François Leclerc :
« Aux USA, 598.000 emplois ont disparu en janvier (après correction des variations saisonnières). Réactives comme elles savent l’être dans ce domaine, les entreprises américaines licencient à tour de bras, dans tous les domaines d’activité. La tendance est à la suppression d’un demi-million d’emplois par mois. A l’autre bout du monde et de la chaîne financière, en Chine, plus de 20 millions de travailleurs migrants (ces émigrés de l’intérieur des pays émergents) sont désormais sans travail et rentrent forcés et contraints dans leurs campagnes et au royaume de la misère. En Russie, prise dans l’étau de la crise économique, entre la chute du rouble et celle du pétrole, les autorités se préparent à leur manière généralement expéditive à des troubles sociaux. Au Canada, 129.000 emplois ont disparu en janvier, du jamais vu depuis 30 ans. Les mesures de chômage partiel lancées par de nombreuses grandes entreprises de l’industrie allemande, Daimler, Volkswagen ou BASF, se poursuivent et ont concerné 290.600 salariés en janvier, selon le pointage mensuel de l’Agence fédérale pour l’emploi (BA). Le chômage a en Espagne atteint un niveau record depuis 12 ans, en janvier, avec 3,3 millions de demandeurs d’emplois et le taux le plus élevé de l’Union européenne. »
http://www.pauljorion.com/blog/
Le 18 novembre dernier, j'ai eu l'avantage d'accueillir Bernard Lietaer dans une journée de réflexion que j'avais organisée sur le thème "fric story". Bernard Lietaer est un spécialiste des questions monétaires. Il a été des architectes du processus de convergence européenne qui a préparé le terrain à l'euro. Dans "The future of money", il avait annoncé il y a déjà plusieurs années la "crise" que nous sommes en train de vivre. Parlant l'autre jour de celle-ci, il nous a assuré que nous n'avions encore rien vu et que le tsunami ne se limiterait pas à la vague que nous venions d'essuyer. Le "credit crunch", dont les effets sont déjà manifestes sur l'économie réelle, amènera en contre-coup une deuxième récession bancaire qui à son tour...
Quand donc les écailles vont-elles nous tomber des yeux et allons-nous cesser de croire qu'avec plus de régulation le Titanic financier va remonter à la surface et l'orchestre englouti se remettre à jouer ? Quand, en premier lieu, allons-nous faire un sort à la croyance qu'on peut créer de la richesse rien qu'en faisant travailler l'argent sur lui-même ? Ce n'est pas de l'économie, c'est de la cavalerie! En second lieu, quand allons-nous remettre en question notre vision de l'efficacité qui nous conduit systématiquement à promouvoir la monoculture, qu'il s'agisse des espèces végétales, animales ou monétaires ? Ce faisant, nous créons des écosystèmes si fragiles que, lorsque cela ne va plus, ce n'est pas un ajustement à la marge qu'il faut subir, c'est un raz-de-marée.
Mais, à entendre les discours, notre gratin politique, économique et financier n'a pas encore trouvé son chemin de Damas. De quoi parle-t-on ? D'injecter de l'argent dans un système financier dont on a vu les avanies; de fusionner des institutions qui ainsi seront encore plus grosses et encore moins nombreuses; d'accroître et de perfectionner une règlementation qui, atteinte d'une maladie de pléthore galopante depuis des années, n'a rien empêché; etc.
Anne-Caroline Paucot, dans son "Dictionnaire impertinent du futur" vient de créer le mot "solublème": la solution qui engendre un problème. Je ne sens pas nos élites sur la voie d'une conversion et je redoute que nous n'ayons pas à attendre bien longtemps pour voir apparaître beaucoup de solublèmes qui ne feront qu'empirer la situation.
http://www.dictionnairedufutur.fr/
19:20 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : économie, crise, cadre de pensée, idéologie
04/02/2009
Al Capone
Un expert de la question:
"Le capitalisme est le racket légitime organisé par la classe dominante".
Cité par Hervé Kempf dans Pour sauver la planète, sortez du capitalisme (Le Seuil, 2009).
16:02 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : capitalisme, économie, écologie
02/02/2009
Naissance de "Transitions"
Mon ami Manfred Mack et moi venons de nous lancer dans une folle aventure: la création et la diffusion d'une nouvelle publication. Le premier numéro vient d'en être livré par l'imprimeur. Le nouveau-né s'appelle Transitions et, comme tous les parents, nous en sommes très fiers!
Transitions exprime, en premier lieu, une conviction : celle que notre monde est à une période cruciale de sa vie. Nous sommes sur cette frange de l’histoire où le désordre commence à sourdre de l’ordre que l’on croyait bien établi. Le réflexe peut être celui du déni et de la crispation. Nous pensons au contraire que ce désordre naissant rouvre des espaces qui peuvent libérer le cours de notre histoire. Nous y voyons – et nous aimerions y voir avec vous - une opportunité pour devenir – tous - des co-créateurs d’un monde meilleur et plus beau.
Transitions veut aussi démontrer par l'exemple cette autre de nos convictions - bien ancrée grâce aux travaux de Basarab Nicolescu - que, pour comprendre ce qui est en train de se produire, il nous faut sortir du cloisonnement des disciplines. Comprendre – com-prendre - c’est «prendre avec». C’est prendre plusieurs choses à la fois afin d’en élucider les relations. C’est prendre à plusieurs, parce que de différents esprits seulement peut émerger une représentation point trop appauvrie de ce qui nous interpelle. La physique quantique ne nous enseigne-t-elle pas que la matière peut se présenter comme onde ou comme particule selon l’outil que nous utilisons pour l’observer ?
Ceci nous amène à un point, pour nous, essentiel : penser ne nous place pas hors du monde. Tout au contraire, penser est s’engager. Dans son effort de maîtrise, le monde qui s’achève nous a en partie coupés de notre puissance de rupture et de création. Transitions se veut un lieu d’inspiration, une invitation à réintégrer l'audace dans nos façons de penser et d’agir. C’est pourquoi Transitions sera aussi très rapidement, pour ceux qui le souhaiteront, une occasion de se rencontrer.
Car Transitions résulte, pour ce qui nous concerne, d'un désir: celui de partager. L’aventure de la vie, un goût prononcé pour l’exploration et les rencontres improbables favorisé par les lieux d’observation et les réseaux que nos activités professionnelles nous procurent, tout cela a fait de nous des guetteurs éclectiques de ce qui émerge dans les interstices de ce qu’on appelle « la réalité ». Le produit de cette veille et nos envies d'expérimentations est ce nous avons envie de partager.
Ce premier numéro a pour thème "La conversation". Nous avons essayé d'aborder ce sujet depuis les conversations les plus intimes, celles qui naîssent au sein de nous-mêmes de nos conflits et de nos richesses intérieures, et jusqu'au registre collectif, où elles permettent de cristalliser une aventure commune. Nous avons invité à s'exprimer aussi bien la psychanalyse que la psychologie, les sciences cognitives que la biologie culturelle du Matritztic Institute, l'ethnologie que la pédagogie, la spiritualité, le développement.
Cela donne au sommaire - outre la prose des rédacteurs de la revue - des entretiens avec:
- Stanley Krippner, "Le dialogue intérieur",
- Djohar Si Ahmed, "La conversation, domaine de l'être",
- Christine Hardy, "Constellations de sens",
- Humberto Maturana et Ximena Davila, "Les mondes que nous créons naissent en réseaux de conversations",
- Alastair McIntosh, "La parole et la recherche de l'unité",
- Jean-Godefroy Bidima, "La palabre, éthique du lien social",
- Nick Wilding, "Conversations pour un monde nouveau",
- Béatrice Barras, "Conversations de chantier au Viel Audon",
- André Conraets, "Conversations pour apprendre",
- Lonny Gold, "L'attention".
Transitions est disponible auprès des auteurs. Si vous êtes intéressés, merci de m'écrire à: thygr@wanadoo.fr
10:30 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : nouvelle publication, transdisciplinarité, humanisme, économie, philosophie, sciences cognitives, management