11/07/2009
Destruction créatrice ou création destructrice ?
Ceux qui ne savent pas voir les limites de leur idéologie sont condamnés à aller dans le mur ou, ce qui est plus grave, à y envoyer les autres. L’URSS et son économie administrée se sont ainsi effondrées. Devant cette faillite, le seul challenger - le libéralisme - est apparu comme s’il détenait la vérité et, du coup, on lui a lâché la bride. Il semble que nous ayons du mal à penser autrement que de manière binaire : blanc ou noir, lui ou moi, juste ou faux, etc. On est loin de la pensée complexe prônée par Edgar Morin.
Le libéralisme – bien mal nommé à vrai dire puisqu’il est rien moins que libéral au sens propre du terme – s’est teinté du néo-darwinisme qui lui donne un socle pseudo-scientifique et il se pose aujourd’hui comme la seule représentation réaliste du monde. Tout le reste – mutualisme, coopération, associationnisme, économies mixtes, etc. – ne serait que rêveries fumeuses et surtout tricheries perturbatrices de la concurrence parfaite sur un marché parfait qui est censée faire – un jour - le bonheur de l’humanité.
Le problème n’est pas qu’un système veuille se répandre. S’il produit ce que l’on souhaite et si les gens en veulent, que dire ? Le problème, c’est quand ce système s’en prend au cerveau et rend à ce point aveugle à ses errements et à ses faillites que même ses victimes n’imaginent pas qu’il puisse exister autre chose et se condamnent à essayer de le sauver. Paul Watzlawick parlait de ces comportements en boucle où, n’obtenant pas le résultat désiré, on s’acharne à faire toujours plus. Toujours plus de la même chose évidemment. Et tout aussi évidemment on n’obtient que toujours plus du même résultat indésiré. Et on s’en étonne !
C’est bien la situation redoutable que nous vivons en ce moment. Le monde que nous avons construit est régi par quelques grandes croyances : la destruction créatrice, la croissance infinie, la mondialisation des marchés et « l’unification généralisée » des législations, des modes de production, des formes d’organisation, des monnaies, etc. Or, ce monde, à côté de quelques réalisations indéniables, s’accommode d’effets secondaires détestables, comme la multiplication des fractures sociales, l’explosion répétée de bulles spéculatives croissantes et la dissolution du lien social. Il accumule en outre sur nos têtes les charbons ardents du dérèglement climatique, des problèmes de santé liés à la pollution de l’air, de l’eau et des aliments, et de la destruction de l’écosystème terrestre.
Combien de temps, dans l'illusion de nous sauver, allons-nous continuer à faire toujours plus de la même chose ?
11:52 | Lien permanent | Commentaires (3)
Commentaires
Le problème n'est-il pas que "les gens" ne veulent pas de ce système mais que leur opinion n'a pas les moyens de s'exprimer. Le " système" est une donnée indiscutable : le mettre en cause même théoriquement n'est pas recevable à un certain niveau. Il semble aussi que la volonté de réformer le système financier à New York et à Londres se heurte à une quasi impossibilité.
Écrit par : mayer | 11/07/2009
Quand les gens élisent le président que nous avons, c'est bien qu'ils cautionnent un type de réussite qui est en fait une pure émanation de ce système... Ils s'expriment. Ils expriment en tout cas leur univers mental.
Peut-être sont-ils comme ces chrétiens contemporains de Luther qui trouvaient que le frère Martin ne disait pas que des bêtises mais qui se rapprochaient de l'Église au moment de mourir. Après tout, si le Vatican avait raison ?
Si Wall street, ses prêtres et leurs acolytes avaient raison ? Qui sommes-nous pour oser penser à côté de ces experts!
A propos, Mayer ? Michel Mayer ?
Écrit par : Thierry | 11/07/2009
Nous avons compris le péril. Il importe désormais d'inventer. Dans son chemin entre Eros & Thanatos, Humanitas hésite constamment. Il est difficile, voire impossible, de se placer d'un point de vue extérieur. Il n'y a pas de leçons à donner. Seulement des actions à expérimenter. Car, comme Karl Popper nous l'a enseigné, personne ne sait vraiment. Comme Murray Rothbard l'affirme: nous apprenons dans l'action. Comme Jean-François Zobrist l'a prouvé: l'action sauve.
Écrit par : Christian Mayeur | 14/07/2009
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