02/06/2019
Seven et la transition écologique: L’Orgueil
L’Orgueil est, avec l’Envie, l’autre origine des comportements ostentatoires. Une de ses manifestations me révulse particulièrement: les selfies d’un impavide chasseur ou d’une Diane chasseresse au sourire hollywoodien, campant fièrement derrière la malheureuse bête - girafe, éléphant ou lion - qu’ils viennent d’abattre. Certes, le nombre des victimes que fait cette fatuité imbécile est relativement faible. Elle me paraît être cependant un juste symbole de ce que l’Orgueil peut recéler d’aveugle et destructeur.
Le trophée joue un grand rôle dans les comportements de parade de l’Orgueil. Ce qui en fait fonction peut être fort différent d’une personne à l’autre et n’est pas nécessairement conquis par le sang. Il peut tout simplement manifester la fortune financière. Il ne s’agit pas alors des massacres des animaux que l’on a tués, mais des bijoux et des vêtements que l’on porte (29), des restaurants que l’on fréquente, des moyens de transport que l’on privilégie, des tableaux que l’on accroche au mur de son salon - parfois même de la femme que l’on a à son bras. Pas de quoi pleurer sur le sort de la Planète, me direz-vous, même si le jet privé ou le yacht ne sont pas des exemples de sobriété énergétique. Que dire cependant du coût écologique de l’extraction des matières précieuses, pierres ou métaux ? Que dire des souffrances des animaux dont on arrache la fourrure pour en faire des fanfreluches ? Et, surtout, les capitaux qui permettent de profiter de tout cela, comment ont-ils été créés, capturés, augmentés ? Où prennent-ils leur source et de quoi se nourrissent-ils ?
L’Orgueil peut être « corporate ». Le prestige d’être au service d’une grande entreprise - aux hasard: Bayer, Monsanto, Soros Fund Management … - peut annihiler la conscience de l’individu. Si ce n’était le cas, ces organisations tomberaient vite en panne de serviteurs et de compétences et leur nocivité diminuerait d'autant.
Le dernier Festival de Cannes a mis en scène à sa manière cette foire aux vanités. J’aime les films. Ils m’ont fait vivre des prises de conscience et de merveilleuses émotions - et m'ont même procuré des moments inattendus de communion avec mes semblables, comme ce soir de 1982, à Toulouse, alors que défilait le générique de fin du Gandhi d’Attenborough. Le cinéma a permis l’apparition de compétences et talents qui n’existaient pas (ou pas dans les mêmes registres) jusqu’à lui : compétences et talents de scénaristes, de réalisateurs, d’acteurs, d’ingénieurs du son ou de l’image. Le Festival de Cannes a toujours aimé les paillettes, cela fait partie de son charme, mais il semble qu’il n’ait pas pris en compte notre changement d’époque et s’avilisse dans le gâchis aussi futile que spectaculaire dont il est le prétexte. Je lisais dans la presse que, par exemple, on y jette beaucoup de nourriture et que, pour le pur plaisir de parader, l’on y consomme sur terre ou sur l’eau beaucoup de carburant. Connaissant les ressorts mimétiques de notre espèce, à tout le moins on y encourage des atavismes nocifs.
Il faudrait se garder d’attribuer les manifestations de l’orgueil aux seules classes les plus riches ou les plus en vue. Chacun a ses consommations ostentatoires, sa manière d’être orgueilleux et parfois au détriment de la nature, de la vie. Je citerai une anecdote aussi dérisoire que symbolique. Il y a bien des années, j’ai habité un village à quelques kilomètres de Toulouse. Nous avions un jardinet de façade, à peu près dix mètres carrés avec quelques rosiers vigoureux plantés par le précédent locataire, quelques autres fleurs et un peu d’herbe. Un jour le propriétaire décida de remplacer cela par une couche de ciment. « Cela fait plus propre » déclara-t-il fièrement. Sans aller jusqu’au bétonnage, quels sont ceux de nos comportements et de nos croyances que sous-tend une forme d’orgueil et qui sont nuisibles à la Terre, même si c’est de manière infinitésimale ? Compte tenu de notre nombre, l'infinitésimal est en train de devenir important.
Cependant, le pire de l’Orgueil est peut-être ailleurs. Il est de rendre sourd aux vérités qui pourraient perturber l’égo. L’Orgueil ne veut surtout pas être remis en question. Il est une carapace, celle du refus de la conscience et de l’évolution personnelle. C’est pourquoi les théologiens y ont vu le plus redoutable des Sept péchés capitaux.
(29) https://e-rse.net/industrie-mode-impact-environnement-201...
19:00 | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
Oui merci d avoir synthétisé mes pensées brouillonnes et vagabondes communes à beaucoup de nos congénères,orgueil qui entraîne la compétition: plus ,mieux que le voisin ,que ma copine, etc , ça débute tot ,c est désespérant depuis l Aube de l humanité (gnagnagna ,j enfonce des portes ouvertes ...regnagnagna...)mes chats mes chiens sont jaloux ....je me suis toujours demandée :l envie est elle moins destructrice que la jalousie ??? J envie certaines vies mais je ne veux voler ou détruire ceux qui la vivent.... J ai pris conscience depuis peu du gâchis actuel ,aussi j essaie de comprendre mais le temps est compté....
Écrit par : Meric | 04/06/2019
Et voici un exemple : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/09/01/co2-eau-microplastique-la-mode-est-l-une-des-industries-les-plus-polluantes-du-monde_5505091_4355770.html?fbclid=IwAR2NWKDnnZjf_lIhlgVTOGDUKetlEQp4fNHxOlIwLWv8B_vnB2qxxZf_mSU
Écrit par : Thierry | 03/09/2019
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