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22/06/2022

Apocalypse (1/3)

Le terme d’apocalypse est communément utilisé pour évoquer une fin du monde cataclysmique. En réalité, il signifie dévoilement, révélation. L’on peut articuler les deux acceptions si l’on considère que les vraies révélations permettent d’achever un monde pour en construire un autre. Nous sommes nombreux à avoir aujourd’hui la sensation voire la conviction d’être en train de vivre, sinon la fin du monde, en tout cas celle d’une civilisation. Aux multiples crises qui se mêlent, il semble n’y avoir d’autre issue qu’un effondrement, et on en viendrait à l’espérer, à l’attendre avec impatience. 

 

Jusqu’à ces dernières années, nous avancions sur une route qui avait ses conforts et ses défauts et qui, surtout, était la route. L’un des mérites de la situation actuelle est de faire apparaître, si nous voulons le voir, qu’il n’existe de routes que celles que nous construisons en fonction des orientations dans lesquelles nous persistons. Nous les construisons à la manière des fourmis: à chacun de leurs passages, elles laissent des trace qui induisent un nombre croissant de fourmis à emprunter le même itinéraire. C’est ainsi que, sous des routes modernes, des archéologues ont retrouvé des voies médiévales puis romaines et parfois, plus profondément encore, des sentiers préhistoriques au dessus de pistes de dinosaures. Les pas attirent les pas. 

 

Il arrive aussi que nous fassions comme les Dupont et Dupond d’Hergé qui, dans le désert, tournent en rond sur leurs propres traces en croyant qu’elles vont les mener quelque part. 

 

La route que nous sommes en train de construire

 

L’une des routes qui se construit en ce moment, sur laquelle nous sommes déjà bien engagés, nous conduit vers une gestion totalitaire de l’humanité. C’est la réponse que donne une caste ploutocratique mondiale à l’impossibilité physique de poursuivre dans la direction du toujours plus que réclament les peuples. En ce sens, cette caste a l’intelligence de la situation. En outre, elle est réaliste: entre les masses financières qui sont à sa disposition et, comme l’a montré la « crise sanitaire », les responsables de tout milieu qu’elle tient dans le creux de sa main, elle a aussi les moyens de mettre en oeuvre sa solution. Mais celle-ci, qui consiste à organiser un monde viable sur la soumission et le contrôle absolus de chacun d’entre nous, ne respecte pas le potentiel d’évolution des hommes. D’abord, elle n’est que la culmination de la pensée industrielle transposée à l’espèce humaine, mais, surtout, elle induit un détournement de notre destin collectif en réservant à un tout petit nombre la possibilité d’être vraiment humain, c’est-à-dire d’avoir la maîtrise de sa vie et la capacité d’initiative et d’évolution. 

 

En face de cette solution abominable, croire que l’on peut rebrousser chemin pour retrouver la route qui nous était familière relève du syndrome des Dupont et Dupond qui font des ronds dans le sable et, sauf intervention de la Providence, finiront morts de soif au soleil. La « croissance verte » est un de ces ronds dans le sable. C’est un leurre. Le tout-électrique qu’elle prône, avant même d’avoir été déployé, fait déjà apparaître les frontières physiques propres à son développement. Au surplus, le processus totalitaire est déjà trop avancé pour que ses promoteurs reviennent dessus. Pour eux, quelque cruel qu’il soit, il représente le salut qui leur convient. Il n’y manque qu’un peu plus de technologies invasives, un peu plus de numérisation et, avec notre complicité passive ou active, l’affaire sera dans le sac. Je veux croire, quant à moi, que nous avons une autre option: une route qui reste à construire. Mais c’est la direction de l’effort et de l’inconnu. A vrai dire, aujourd’hui, notre choix n’est plus qu’entre l’inconnu et le totalitarisme. 

 

L’enjeu de l’évolution

 

Si l’on considère que l’agonie du monde présent est apocalyptique au vrai sens du terme, c’est-à-dire révélatrice de choses cachées, qu’a-t-elle à nous dire qui pourrait nous aider à faire de la voie de l’inconnu celle du salut ? De quoi le moment que nous vivons -  un tournant à l’échelle des millénaires de notre histoire - pourrait-il être le dévoilement ? Ma vision personnelle est que l’enjeu est du registre de notre évolution. Or, c’est par les civilisations que nous inventons qu’elle passe désormais. Comme l’a montré Edgar Morin, ce que nous créons nous crée en retour. C’est l’aventure humaine. Si nous voulons mettre en oeuvre une saine relance de celle-ci, quelques prises de conscience préalables sont selon moi inéluctables. Et c’est justement là que l’expérience de la « crise sanitaire » peut nous aider. Pour ceux dont les écailles sont tombées des yeux, elle a révélé des problématiques cruciales: notre vulnérabilité à la manipulation, notre facilité effrayante à devenir cruels, la naïveté avec laquelle nous avons laissé se construire et avons nourri un pouvoir qui est notre ennemi, enfin le vide spirituel de la vie ordinaire et le lien intime entre notre monde intérieur et le monde extérieur. Nous avons là à désamorcer des inhibiteurs de notre évolution tant personnelle que collective. A condition de le faire, nous pourrons ouvrir la route d’un meilleur avenir. 

 

Il faut d’abord être prêt à admettre que l'on a été envouté

 

La caverne de Platon, ce lieu d’illusions organisées dont les hommes doivent s’évader pour accéder à la vérité, est l’une des métaphores les plus puissantes de la condition humaine. Si une masse d’hommes et de femmes - rien de moins qu'une masse afin qu’il s’agisse d’une véritable apocalypse - choisissait de s’évader de la caverne, la première chose qui lui serait dévoilée serait comment ses opinions et ses comportements ont pu être manipulés pendant des mois et des années. Pour cela, il nous faut d’abord être prêts à admettre que nous avons été victimes d'un sorte d'envoutement: c’est ainsi que nous briserons les fers qui nous retiennent dans la caverne. Si l’humanité prend conscience qu’elle a pu vivre dans une illusion volontairement créée pour l’abuser et la soumettre, elle apprendra beaucoup et surtout d’elle-même. Non seulement elle sera vaccinée contre de futures tentatives de manipulation, ce qui rendra de nouveau la démocratie possible, mais en outre elle pourra grandir en conscience.

 

(à suivre) 

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