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10/05/2009

Cygnes et signes

« The black swann » - le cygne noir - de Nassim Nicholas Taleb, que j’avais découvert avec jubilation dans sa version originale, est arrivé dans nos rayons francophones et je vous invite à le lire. Un cygne noir, c’est un évènement spectaculaire qui fait irruption dans votre vie, totalement imprévu et imprévisible, et dont on se demande cependant après coup comment on ne l’avait pas vu venir. Bien sûr, on pensera à la crise financière que tout le monde aujourd’hui s’entend à expliquer alors que ceux qui l’avaient annoncée se comptent – à ma connaissance du moins – sur les doigts d’une main. Personnellement, je ne pourrais même en citer que deux : Bernard Lietaer et Paul Jorion, qui ont l’un et l’autre laissé des traces écrites de leurs avertissements. Pour la petite histoire, Nassim Nicholas Taleb avait présenté ses idées sur le cygne noir devant le top management d’une grande banque réuni à Ceylan – excusez du peu, mais il y a des cerveaux qui nécessitent des atmosphères particulières pour se nourrir. C’était quelques mois avant qu’un de leurs traders fasse éclater la grenouille à force de la gonfler, puis que les subprimes explosent à leur tour. Cependant notre penseur de l’incertain n’avait obtenu qu’un silence poli teinté de suffisance quand il avait fait l’hypothèse que, lorsqu'il se passe quelque chose de vraiment important, c’est toujours ailleurs qu’où on porte habituellement son attention.  

 

A entendre certains, nous aurions pourtant fait de grands progrès dans la détection des cygnes noirs. Et de citer en exemple la grippe cochonne. J’ai des doutes. Il y a une huitaine de jours, un grand quotidien titrait à la une : « La pandémie est imminente ». Dans le même temps, on a cité des chiffres de mortalité humaine qui étaient plus élevés le vendredi que le lundi suivant, à croire qu’il y avait eu entre temps quelques résurrections. Par ailleurs, je ne sais pas le volume des substances proches de leur date de péremption que la peur - jointe au « principe de précaution » - a permis d’écouler sur une grande échelle. Un chiffre d’affaires d’un milliard et demi de dollars, si ma mémoire est bonne, rien que pour les Etats-Unis. Ce cygne noir-là n’était peut-être qu’un malheureux cochon affublé de plumes de dindon. Si j'étais un gars de l'OMS, je prendrais le risque de regarder ailleurs.

 

Car, si l’on y regarde de plus près, est-ce parce qu’il est le rare représentant d’une espèce singulière que le cygne noir nous surprend ainsi ? Non, bien sûr. Cet animal nidifie exclusivement dans la zone aveugle de notre représentation du monde. Là, il lui faut grossir jusqu’à déborder de cette zone aveugle pour que nous puissions enfin le voir. C’est dire que sa taille sera à proportion de notre tache aveugle : rapportez cela à la crise financière issue des subprimes et vous aurez une idée de la surface qu'elle occupe dans notre cerveau. Bernard Lietaer disait d’ailleurs il y a quelques jours, à Rennes, que ce ne sont pas les crises financières – et leurs analyses - qui ont manqué au cours de l’histoire. Dès le XVIIième siècle, on trouve aux Pays-Bas la folie de la tulipe qui n’a pas grande différence avec ce que nous vivons. La tache aveugle est aussi le trou noir de notre mémoire.

 

Nous avons tous, individuellement ou collectivement des taches aveugles. C’est dans notre condition d’êtres humains. En général, dans une culture donnée, elles se situent aux mêmes endroits. C’est pourquoi, de ce point de vue-là, nous ne pouvons guère être un secours les uns pour les autres. Quelques originaux, cependant, les ont ailleurs. Ceux-là pourraient nous avertir. Mais ils nous disent des choses que nous n’entendons pas – l’oreille a aussi ses taches de surdité – ou qui nous dérangent tellement, qui nous agacent à un tel point qu’elles nous font rejeter ces fâcheux, ces empêcheurs de penser en rond, en même temps que leur discours.

 

Aujourd’hui, les originaux disent des choses du genre : la crise ne fait que commencer, les remèdes actuels n’apporteront qu’une amélioration provisoire. Ils disent aussi : pas de société durable sans une relocalisation relative de l’économie, la mondialisation est le monopoly des riches. Ou encore : les OGM sont une fausse bonne solution. Et encore : le consensus sur le réchauffement climatique est une erreur historique d’analyse...

 

Et si nous n'étions pas dans le monde que nous croyons ? Le cygne noir devra-t-il atteindre  la taille d’un pachyderme pour que nous lui accordions un regard ?

26/01/2009

Aujourd'hui, le coup de gueule de Francis Karolewicz!

AGIR OU SUBIR

francis portrait.JPGLes oiseaux de mauvais augures rôdent autour de nous annonçant des temps difficiles. Le ciel s’obscurcit et tout le monde se met à l’abri de peur de se mouiller. Mais le piège est justement là. Au lieu de se mettre tous ensemble immobile et transis de froid à attendre les beaux jours, nous devrions plutôt nous mobiliser pour agir et repousser les abîmes d’une nuit sans fin. En effet, la crise est là ! Et nous en sommes tous responsables. Les sourds qui n’ont rien voulu entendre, les aveugles qui ont préféré détourner leur regard et les muets qui se sont tus.
Nous sommes une société de malentendants et d’handicapés de la vie choisissant de survivre avec leur handicap plutôt que de lutter et d’agir pour retrouver la vitalité de leur existence.

Avant d’être une crise économique et financière, la crise actuelle est celle de la moralité, de l’éthique, de l’argent facile, de la lâcheté. Nous avons tous troqué l’être contre un peu plus d’avoir, nous avons échangé la qualité des liens familiaux, sociaux et professionnels contre un peu plus de matière et un peu moins de relation. Nous avons oublié nos enfants et les batailles de nos aînés pour nous construire une vie meilleure comme un château en Espagne. Le mot durable est dans toutes les bouches, alors que notre société repose sur une production et une consommation de l’éphémère. Notre peur de la pauvreté, de l’abandon et du changement nous enferme dans une résignation qui nous pousse à nous poser en victime et à montrer du doigt ceux qui nous ont nourri mais que nous avons nous-mêmes alimentés.

Il est temps de faire de cette crise une opportunité de changement, de rupture et non de continuité. Nous sommes tous acteurs de ce monde que nous adorons ou abhorrons. Nous en sommes les consommateurs, les bâtisseurs et les détracteurs. Il ne faut pas croire que le seul acte responsable que nous ayons à faire est celui de voter pour la personne qui aura la charge de construire la société que nous désirons. Nous avons la fâcheuse habitude de déléguer aux autres la responsabilité de notre vie et de nous insurger quand cela ne nous convient pas. Nous avons échangé notre liberté contre une poignée de deniers et nous refusons de revoir les principes de ce troc. Nous oublions que le monde bouge et que nos enfants sont les légataires universels de notre égoïsme et de notre refus d’écrire une autre histoire que celle que nous avons programmée par avance. Pourtant le traçage du monde de demain est en train d’être revu et corrigé non pas par les scénaristes d’Hollywood mais par ceux qui décident d’y participer et de dire NON à un monde construit sur l’avidité, l’argent facile, l’individualisme et le paraître. L’Histoire nous a montré que les sociétés arrivant à maturité de leur apogée disparaissaient, laissant place à d’autres formes de société et de leaders. Nous ne sommes pas obligés de disparaître mais nous avons l’impérieuse nécessité de créer un nouvel ordre mondial dans lequel chacun doit prendre conscience qu’il est acteur de ses décisions, auteur de ses choix et constructeur du monde de demain. Pour cela il ne faut pas avoir peur de se mouiller mais agir en personne responsable qui apprend à ne plus être victime et à discerner ce qui devient essentiel pour construire un monde plus juste, plus relationnel et plus durable pour les générations à venir.

Les anciens plantaient des arbres dans leur champ pour leurs petits enfants en prévoyant que ceux-ci en auraient besoin pour construire leur maison. Nous devons nous aussi penser à nos enfants et à leurs futurs enfants en participant activement à la conception d’un monde plus humain et moins mécanique, plus enraciné et moins virtuel. La solidarité collective passe par la responsabilité individuelle alors agissons pour tous et n’attendons pas la nuit sans fin pour trouver la lumière qui éclairera notre conscience. Mettons nous en mouvement pour agir et cessons de subir.


Francis Karolewicz
Directeur fmk consulting
http://www.fmk-consulting.com/accueil/index.php




23/11/2008

Conscience et comptabilité

 

 

Cette note figure désormais dans le recueil

Les ombres de la caverne

Editions Hermann, juillet 2011