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10/02/2008

Des nouvelles de Vence

où le printemps arrive...
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Photo d'Hélène von Reibnitz
http://www.scenarios-vision.com/S+V/FRENCH/START/Default.htm

A propos de modélisation

Il me revient une conversation avec le dirigeant d'une filiale d'une multinationale française, un polytechnicien, qui avait eu précédemment sous sa responsabilité un centre de recherche. Une des activités principales de ce centre était de comprendre des phénomènes complexes et la culture y était essentiellement mathématicienne. C'était au surplus une équipe internationale, composée notamment de Français et d'Américains, avec, parmi ces derniers, quelqu'un qui avait été l'élève d'Einstein. Mon interlocuteur avait remarqué que, lorsqu'il confiait un sujet à cette équipe, les Français avaient un temps de réaction très rapide alors que les Américains attendaient l'échéance pour rendre leur "copie". Il avait fini par demander à ces derniers pourquoi ils prenaient autant de temps. "Eh! bien, lui avait répondu l'ancien élève d'Einstein, vous vous doutez bien que construire un modèle mathématique ne constitue pas une difficulté pour nous. C'est affaire de quelques heures. En revanche, s'assurer qu'on n'a rien oublié du problème posé est primordial. Et pour cela il n'y a qu'une façon de procéder: jusqu'au dernier moment, on prend le problème, on le palpe, on le tourne, on le retourne, on le regarde sous toutes ses faces, on le laisse, on le reprend, et ainsi on se donne un maximum de chance de n'en avoir omis aucun élément. Tout à la fin, seulement, on passe à la modélisation." L'homme qui répondait ainsi pratiquait également la sculpture sur bois...

08/02/2008

De deux stratégies

La stratégie la plus répandue aujourd’hui, dans nos sociétés, est celle du projet. On se représente un objectif à atteindre. On fait ce qu’on appelle en général un «état des lieux» et, de manière plus ou moins consciente, on modélise la situation qu’il décrit. Puis on conçoit – et on met en place - des « leviers » qui vont faire évoluer cette situation vers l’objectif qu’on a choisi. Ce qui caractérise cette stratégie, c’est la suprématie de la construction mentale. Son efficacité suppose que l’inventaire initial n’oublie rien et que les interactions entre les éléments qui composent le système dont on veut modifier la trajectoire soient toutes concevables. Elle est l’héritière de Newton et du «monde horloge».

L’expérience, cependant, vérifie souvent ce que disait Napoléon : « Il n’arrive que l’imprévu ». On parlera alors d’erreur, ce qui laisse d’abord entendre que la source du problème est la fiabilité des informations utilisées. Ce n’est pas faux. C’est même surtout plus vrai qu’on le pense : de fait, l’information - toujours - est erronée ! Elle l’est pas nature : ce que nous percevons du monde n’est que reflets d’une réalité qui nous échappe, et les édifices mentaux que nous élevons dans nos têtes ou sur nos ordinateurs ne sont – et ne peuvent être – qu’une réduction bestiale de la complexité du réel. Savoir tout est impossible et penser toutes les interactions dépasse les capacités de notre intelligence. Il faudrait donc garder à l’esprit que, n’embrassant que des abrégés de la réalité, notre démarche prétendument rationnelle repose en fait sur une succession de paris. Entre le Charybde de ce que nous ignorons et le Scylla de nos insuffisances, réside en fait surtout l’espoir que nous réussirons à passer !

Je n’ai évoqué que le registre des projets, c’est-à-dire de ce que nous nous efforçons, en dépit de nos insuffisances, de mettre en œuvre. Il faut aussi évoquer ce que, nous appuyant sur le même socle fragile, nous décidons de ne pas mettre en œuvre. Tout ce que, sans prudence aucune et surtout sans humilité, nous jugeons irréaliste, irréalisable ou inintéressant et que, au final, nous interdisons de vie. Un versant caché de l’Histoire est celui des choses que les humains ont écartées. Nous est-il cependant loisible de procéder différemment ? Jean-Marie Betsch, professeur au département Ecologie et gestion de la biodiversité au Museum d'Histoire Naturelle, montre comment les "archaïques" inventent l’agriculture en dialoguant avec la nature. Le dialogue, vous savez : quand on est deux à s’exprimer… Sans violence. Sans « projet »…