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25/10/2007

Harry Potter

Belle histoire que celle de J.K. Rowlings. On peut aujourd'hui expliquer pourquoi Harry Potter a rencontré un tel succès, il n'empêche que l'auteure elle-même n'aurait pas osé en faire la promesse à son éditeur. Le coup de génie aujourd'hui c'est de cristalliser une attente en suspension dans l'air du temps, présente un peu partout et cependant invisible. C'est un effet de rencontre et ce n'est pas valable que pour la littérature. On peut se prendre à rêver d'un phénomène identique dans d'autres domaines... Ce qui est sûr, c'est qu'on n'atteint pas ce genre de triomphe en scrutant les tableaux de bord et en se fiant aux business plans. Spéculer, modéliser, remplir des tableaux excel est hors de propos.

Pour en revenir aux raisons du succès, il ne tient pas à mon sens qu'à l'écriture. Je me souviens d'un entretien avec Marck Luycks, un ancien de la cellule de prospective de Jacques Delors à Bruxelles, qui y voyait le rejet croissant d'une société qui s'est emprisonnée elle-même dans ses procédures, ses égoïsmes, sa courte vue, son refus de rêver et de se vivre en humanité.

Oui, on peut se prendre à rêver d'un Harry Potter qui, avec sa baguette magique, viendrait à s'intéresser à nos institutions, à nos entreprises, à nos systèmes économiques et à nos façons de vivre et de faire société...

17/10/2007

Le paradoxe d'Abilene

Ou comment se retrouver tous ensemble là où aucun d’entre nous n’avait nulle envie d’aller !

Imaginez le porche d’une maison texane, un dimanche matin. Il y a là, assises sur les marches, sirotant mollement une citronnade, les trois générations : les parents, les enfants, le père et la mère de Madame. C’est l’été et il fait déjà très chaud. Tout le monde semble s’ennuyer à mourir. Le beau-père lance alors une idée : et si on allait déjeuner à Abilene ? Abilene, c’est la « grande ville » qui se trouve à près de 100 km. Les membres de la famille se regardent et bientôt la décision est prise de suivre la suggestion de bon papa.

La voiture familiale est vieille, elle n’est pas climatisée et le voyage, à la rage du soleil, est pénible. Arrivé à Abilène, le petit groupe erre longuement dans les rues à la recherche d’un restaurant. Il finit par jeter son dévolu sur un établissement où la nourriture se révèle aussi chère que mauvaise. On rentre, toujours à la rage du soleil et, de retour à la maison, une dispute éclate. C’était vraiment une idée stupide d’aller déjeuner à Abilene !

Le beau-père se défend : lui-même n’avait pas le moindre désir de déjeuner à Abilene ! Simplement il avait l’impression que tout le monde s’ennuyait et il a lancé cette idée-là, croyant faire plaisir, comme il en aurait lancé une autre. Une fois que tout le monde s’est exprimé, une évidence s’impose : personne n’avait envie d’aller déjeuner à Abilene !

Cette histoire a été vécue par le sociologue américain Jerry B. Harvey, qui l’a théorisée sous l’intitulé de «paradoxe d’Abilene»*.

La vie des entreprises, celle de notre société en général, ne mériterait-elle pas qu’on fasse résolument la chasse au paradoxe d’Abilene ?

Vous voulez faire un exercice ? Listez ce qu’en 2020 vous n’aimeriez pas être, vivre, ou avoir dans votre environnement. Et maintenant, avec une rigoureuse sincérité, relevez toutes les petites et grandes décisions, individuelles et collectives, qui vous emmènent vers cet avenir dont vous ne voulez pas. Enfin, demandez-vous pourquoi les personnes concernées prennent ces décisions…

Et si vous avez des exemples à partager, n'hésitez pas, enregistrez un commentaire sur ce blog !

*The Abilene Paradox and Other Meditations on Management (San Francisco: Jossey-Bass, 1988).

10/10/2007

Marketing is dead

http://www.marketingisdead.net/

"Si vous êtes curieux, si vous êtes impertinents, et surtout si vous êtes à la fois curieux et impertinents, bienvenue sur Marketing is dead."

Voilà le genre d'invitation que j'aime bien. Aussi, je vais apporter à François Laurent mon témoignage de « consommateur » (les guillemets ont leur importance).

C'est peut-être la saturation des excès accumulés, mais j'en ai assez d'être le micheton racolé vingt-quatre heures par jour, partout, dans les rues, sur les quais du métro, devant l’écran de la télévision ou de l’ordinateur et jusque dans la poche où je mets mon portable.

Le ridicule des « messages » y cotoie le mauvais goût. Mais la faute de goût n'est pas le plus grave dans cette affaire. Le plus insupportable pour moi, c’est l’histoire qu’on me propose : celle d’une humanité réduite à des imbéciles qui se la jouent grave, comme disent mes ados, parce qu’ils vont pouvoir se payer le dernier truc à la mode, four à micro-ondes, 4x4 ou streetwear de chez Machin-Bidule.

J’en ai assez également que l’on usurpe des sentiments nobles. J’ai du respect pour le commerce. J’ai la conviction qu’il est utile et qu’il peut être un levier du progrès. Mais ne mélangeons pas les genres. Quand des marques vantent le "plus d'amour" qu'il y a dans leurs produits industriels, j'ose espérer qu'elles se ridiculisent et que pas une mère de famille ne tombe dans le panneau.

J’en ai assez qu’on me propose de consommer toujours plus, alors que déjà notre activité détruit la planète aussi sûrement que le néant gagne le monde d'Une histoire sans fin. Plutôt que remplacer ma vieille voiture, je préfère la faire durer et que les ours blancs aient un peu plus de place pour se promener avant de disparaître. Il faut être stupide ou criminel pour acheter le droit de frimer au prix qu’on le fait payer à la planète.

J’en ai assez qu’on me propose de consommer toujours plus, moi qui suis déjà gavé, sans que cette croissance profite à ceux qui en ont le besoin le plus cruel. Il fut une époque où l’économie savait simultanément créer de la richesse et accroître le revenu des gens. Depuis que le marché s’est substitué au territoire, ce cercle vertueux a été rompu.

J’en ai assez que l’information soit choisie en fonction de l’audience qu’elle va mobiliser. Le problème de l’information, dans une démocratie, ce n’est pas celle qu’on nous montre : c’est celle qu’on ne voit pas et dont on n’a même pas l’idée. A vous faire regretter la télévision gaullienne !

J’en ai assez, au final, que mes semblables et moi on nous prenne pour des imbéciles.

Alain de Vulpian le montre clairement dans « A l’écoute des gens ordinaires » : en cinquante ans, nous avons beaucoup mûri. Nous avons acquis, entre autres choses, du recul. Nous savons que le véritable enjeu de l’économie aujourd’hui, ce n’est plus de remédier à la pénurie qu’ont connue nos parents. Aujourd’hui, il s’agit de capturer des flux financiers, les vôtres, les miens, les gros, les petits, les moyens, ceux d’ici et d’ailleurs, afin d’alimenter un système dans lequel nous sommes de moins en moins nombreux à nous reconnaître parce qu’il ne profite pas à l’humain.

C'est à vous donner une envie de décroissance !

Je suis d'accord avec François Laurent: le marketing est mort et s'il ne l'est pas, nous autres, qu’il prend encore pour des consommateurs, on finira par avoir sa peau.