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02/09/2023

E952E

Il n'y a pas d'âge pour une première fois!

E952E est la référence du cours que je donnerai à partir de la rentrée à l'Association Philotechnique (Paris). 

IMG_1194.jpegL'Association Philotechnique, née en 1848 et reconnue d"utilité publique, rassemble des enseignants bénévoles afin de dispenser une grande diversité de cours. Je suis très honoré d'y avoir été admis. 

J'interviendrai dans la section "Ecologie, économie".

Ce cours est un des prolongements de ma chronique "Fécondons l'avenir!" : http://indisciplineintellectuelle.blogspirit.com/archive/...

Voici sa présentation sur le site de l'Association Philotechnique: https://www.philotechnique.org/cours_ecologie_economie.as... 

Et voici la page d'accueil de l'institution: https://www.philotechnique.org/

Je serai ravi d'y retrouver quelques-uns de mes lecteurs !

Bonne rentrée à tous! 

31/08/2023

Le droit des générations futures

Quand on évoque le droit des générations futures, on fait le plus souvent référence à leur droit de vivre sur une planète qui n’aura pas été complètement polluée, enlaidie et appauvrie par les générations qui les auront précédées. Une planète saine, encore riche de ressources, de beauté, de vie animale et végétale. Bref, le discours autour du droit des générations futures, comme en témoigne par exemple la prochaine table ronde de Futuribles International*, est essentiellement environnementaliste ou écologique. On ne peut que s’en féliciter, à condition de ne pas écarter de l’héritage à transmettre des éléments tout autant essentiels. 

 

Le premier de ces éléments est une forme de société dans laquelle on puisse vivre une vie d’humain. Avec l’apparition de l’homme, il y a l’émergence d’une qualité extraordinaire: la capacité créatrice. Elle est la caractéristique de notre espèce et son exercice est un élément de son épanouissement et du bonheur qu’elle peut connaître. Or cette capacité est inséparable de la liberté. Il s’agit donc que le sauvetage de la Terre belle et habitable que nous entendons remettre à nos descendants n’ait pas entre temps fourni le prétexte d’une gestion totalitaire de nos vies, appuyée sur le numérique et l’intelligence artificielle. 

 

Or, la mise en oeuvre d’une gestion industrielle du « parc humain » comme le dirait Sloterdijk, semble bien se préparer. Au nom de la lutte contre le réchauffement climatique, s’accélère une dérive vers la surveillance permanente des comportements, vers des programmes sanitaires (et un jour alimentaire) autoritaires, vers le crédit social à la chinoise. Je n’ai ni le temps ni l’envie de donner ici les informations dont la convergence corrobore ce possible scénario - j’ai en cours l’écriture d’un essai qui y consacre un chapitre - mais l’abattage forcené des bovins en même temps que la promotion des insectes dans l’alimentation humaine, la contrainte du tout-électrique en même temps que l’insuffisance inéluctable à terme de la production de cette énergie, les « villes 15 minutes » dont les autorisations de sortie d’une heure ont donné l’avant-goût, la censure sans complexe des pensées divergentes au nom des vérités officielles, la multiplication actuelle des faillites des petites entreprises et la mainmise du capital sur les circuits alimentaires et des chaînes internationales sur le commerce de proximité, tout cela et plus encore dessine un itinéraire qui peut nous conduire à un cauchemar soviétique modernisé. Le problème, ici, n’est pas que ces « solutions » aient pu être imaginées. Elles ne pourraient être que des idées tirées d’un roman dystopique. Le problème est qu’elles proviennent d’une sorte d’élite mondiale qui, grâce sa puissance financière et à la clientélisation des dirigeants politiques qu’elle a organisée, a aujourd’hui la capacité de les mettre en oeuvre et de les conduire jusqu’au bout.

 

Or, si l’humanité perdure, elle aura besoin de sa capacité créatrice. Comme le montre l’histoire, si les sociétés subsistent grâce à un minimum de conformisme de ceux qui les composent, elles ne surmontent de nouveaux défis que grâce aux non-conformistes capable de faire des événements des analyses différentes et, en conséquence, face à des problèmes complètement nouveaux, d’imaginer des solutions nouvelles. Ces divergents appartiennent assez rarement aux castes qui détiennent le pouvoir, aux courants de pensée qui font consensus. A titre d’illustration, je vous invite à accorder quelques secondes à  la question du réchauffement climatique. Il se peut que nous vivions l’amorce d’un réchauffement qui mette la résilience de notre civilisation à l’épreuve. Mais, compte tenu de ce que nous apprend l’histoire du climat**, doit-on comme le GIEC tout mettre sur le compte du CO2 et d’une origine anthropique de son accroissement ? A des périodes où l’activité humaine ne peut en aucune manière être incriminée, la Terre a connu de grands réchauffements. Autorisons nous à faire l’hypothèse que, si nous connaissons en effet le début d’un réchauffement de cette ampleur, l’homme n’y soit pour rien et que la cause en échappe à notre pouvoir. Etre obsédé par la traque du CO2 va nous affaiblir tout en nous détournant d’imaginer comment nous adapter à l’inéluctable. C’est tout simplement suicidaire. 

 

Il ne faut donc pas se contenter de léguer à nos générations futures une planète écologiquement en bon état. Il faut aussi leur laisser des institutions suffisamment protectrices de leur liberté pour que vivre une vie humaine soit préférable à vivre celle d’un animal en batterie, et que l’humanité conserve le principal ressort de sa résilience. 

 

Si nous voulons une humanité debout et résiliente, il y a d’autres poisons que ceux qui nuisent à la planète et il nous faut nous abstenir de les léguer aux générations futures. Bien que nous en ayons été harcelés, nous ne devons pas transmettre la honte d’être nous-mêmes associée à la drogue délétère de la « repentance ». L’une et l’autre tuent l’âme. Le wokisme, la cancel culture, constituent la pire des pandémies que l’on puisse imaginer. C’est une peste intellectuelle et spirituelle. Tout au contraire, à l’héritage d’une planète saine, il nous faut ajouter l’histoire, notre histoire, une belle histoire enluminée de récits héroïques et des monuments de toute sorte qui parsèment notre territoire et notre culture. Comme l’a dit Alain Foka: « Nul n'a le droit d'effacer une page de l'histoire d'un peuple, car un peuple sans histoire est un monde sans âme. »  C’est pourtant ce que l’on nous propose sous le motif de rendre la justice. Mais songeons justement aux malheureux Aborigènes d’Australie: la déculturation imposée par les colons fut un succès total. Afin d’assurer l’impossibilité de nouvelles révoltes, il fut décidé de tuer l’âme de leurs peuples: les enfants qui avaient survécu au génocide furent placés dans des familles où toute transmission de leur culture était impossible. Au bout de quelques générations, le résultat fut si désastreux - violences, addictions diverses, incestes, etc. - que le gouvernement australien fit appel à un psychothérapeute, Michael White. Celui-ci parvint à la conclusion que la déculturation, l’absence de mythes et de récit collectifs, du sentiment d’appartenance à une lignée, les avait comme privés de colonne vertébrale et jetés dans le vide. Le wokisme est une sorte de colonisation du même genre, dont nous sommes les nouveaux aborigènes. Comme l’a écrit Kant, « la colombe pourrait croire qu’elle volerait encore mieux dans le vide ». Mais si l’on supprime l’air, la colombe, privée de sustentation, tombera.

 

Enfin, il y a ces choses que l’on peut prêcher, mais que l’on ne peut transmettre qu’à la condition de les incarner. Je voudrais, pour conclure, évoquer celles qui me paraissent les plus fondamentales. 

 

La gestion de la « crise sanitaire » a été sur une très grande échelle un test de notre aptitude à la démocratie. Je ne porterai pas de jugement sur les comportements qu’elle a suscités au sein des masses concernées, mais il en ressort que nous avons beaucoup à apprendre. Une majorité d’entre nous a été victime de ce que Noam Chomsky a appelé la fabrique du consentement. Lui-même, en cette occasion, malgré ce qu’il en savait, a vu sa lucidité surprise. Cela signifie que le principal danger de la démocratie est la crédulité des citoyens. Cette crédulité, si elle est bien exploitée, permet d’actionner le levier de la peur et de donner à quelques-uns le pouvoir sur tous. Au vrai, cette crise, qui a été quasiment planétaire et a particulièrement embarqué les pays les plus « civilisés », a marqué l’amorce d’un tournant anthropologique. L’humanité peut-elle s’épanouir dans la liberté ou bien son destin ne saurait-il culminer que dans l’abandon de sa vie à une élite autoproclamée ? La réponse reste encore à donner, mais le temps maintenant est compté. En vertu de ce que j’ai dit plus haut sur le rapport entre notre espèce et la liberté, je veux croire que l’humanité, forte de cette expérience hallucinatoire, saura cultiver la lucidité et le courage afin de déjouer de futures tentatives de subtilisation du destin qu’il lui appartient de se construire. 

 

Il y a deux mille ans eut lieu une révolution. Son récit fait partie de ceux que voudraient effacer à la fois les capitalistes, les wokistes, les transhumanistes et beaucoup d’autres. C’est celui du Christ qui dénia toute vraie valeur aux biens matériels, prêcha l’amour des plus faibles, chassa les marchands du temple, refusa la violence qui aurait pu Lui épargner le supplice et la mort. C’est une histoire qui encombre presque tout le monde aujourd’hui, et même, parfois, ceux qui y adhèrent. Pour faire court, dans le christianisme, il y a au moins trois choses qui défient notre monde finissant et dont j’aimerais que s’emparent les générations futures: le refus du darwinisme social, le refus de la violence et le sens de la transcendance. Il n’y a rien de plus opposé au christianisme que le darwinisme social qui, au XIXème siècle, a donné une absolution pseudo-scientifique à la rapacité humaine. Dans un monde où la loi la plus respectée est celle du plus fort, où l’adulation va aux gloires futiles et à l’enrichissement à tout prix, prêcher à nouveau l’empathie pour les pauvres, les faibles et même les perdants - les losers! -, est ce qu’il y a de plus révolutionnaire. La seconde chose qu’affirment les Evangiles est la non-violence. « La vie n’est qu’une histoire de bruit et de fureur » fait dire Shakespeare à Macbeth. Une planète en bon état mais où l’humanité continuerait de propager « bruit et fureur » ne marquerait pas un grand progrès. Je ne fais pas partie des « bisounours », je les critique même souvent, mais la non-violence n’est pas à confondre avec la mollesse, l’acceptation de tout et de n’importe quoi. Elle est le refus de se laisser emporter par la violence de l’autre. Elle est le refus de la transmettre. Elle n’est pas le refus d’oeuvrer pour un nouveau monde. Le troisième élément qui brille au coeur du récit évangélique - mais aussi dans d’autres - est la transcendance. Il y a deux mille cinq cents milliards de galaxies et, sur un grain de poussière, au sein de l’une d’entre elles, il y a la conscience humaine. Cela mérite que l’on médite sur ce qui devrait occuper cette dernière. Le système des besoins humains selon moi le plus pertinent, celui de l’économiste chilien Manfred Max-Neef, n’en recensait au début que neuf. Au terme de ses observations, Max-Neef lui en a rajouté un dixième: le besoin de transcendance, dont il écrivit qu’apparu peut-être tardivement par rapport aux autres il était en voie de se développer. Ne laissez pas votre conscience s’absorber dans de vaines préoccupations. « Vous êtes le sel de la terre ». 

 

* https://r.aboreport.fr/mk/mr/sh/6rqJ8GoudeITQjupd0QQee9si... 

** Olivier Postel-Vianey, Sapiens et le climat, Presses de la Cité, 2022. 

25/07/2023

Plasticité de l’être humain 

 

Les Allemands, l’un des peuples européens alors les plus cultivés et pas plus méchant que les autres, se sont laissés happer par le nazisme. Dans notre pays, il y eut à la fois des Jean Moulin et des traitres qui, les dénonçant, les ont envoyés à la torture et à la mort. Il y eut aussi des Lacombe Lucien* dont la bifurcation dans la mauvaise direction tint à un cheveu. Selon moi, il convient de rester humble. Bien prétentieux est celui qui affirme aujourd’hui, sans avoir vécu d’évènements semblables, qu’il aurait été du côté de la Résistance active. En chacun d’entre nous, le saint et le bourreau voisinent, de même que le martyr et le lâche, l’idiot et le génie et bien d’autres. Les révéler, leur donner corps est affaire de rencontre de notre émotionnel avec les hasards de la vie, tant des évènements que des êtres humains. La maturité psychologique, qui n’est pas une question d’âge, est l’aptitude à ne pas se laisser entraîner dans de mauvaises directions. Cela nécessite une lucidité en éveil appuyée par la volonté de s’éduquer sans cesse. 

 

Les choix que l’on fait dans ce genre de situation n’ont pas grand chose à voir avec le quotient intellectuel. L’intelligence ne fait pas le héros et ne protège pas des dérives. A preuve, Noam Chomsky: il a dénoncé et démonté avec une grande acuité ce que l’on appelle « la fabrique du consentement » et il est tombé dans le piège de la propagande covidiste. Cela jusqu’à exiger que l’on enferme ceux qui refusaient les injections expérimentales. Chez nous, un philosophe bien connu, en même temps que ses nerfs a perdu sa philosophie et en particulier son fier stoïcisme au point de réclamer la même chose. Hitler promettait aux Allemands trois choses dont ils étaient cruellement privés: du pain, de l’honneur et du travail. A un nonagénaire légitimement conscient de la fragilité de sa vie ou à un philosophe au système nerveux fragile, le pari d’une fabrique du consentement était trop énorme, trop risqué. Les injections, au contraire, leur promettaient une chose pour eux essentielle: réduire la peur de la mort. C’est alors que, des tréfonds de leur psyché, un tyran a surgi. 

 

Au surplus, la conviction d’être au service du bien en même temps légitime et déchaîne les comportements tyranniques que beaucoup d’entre nous portent en germe. La résistance les exaspère. La jouissance de l’autoritarisme a alors pour pendant ce que Goethe appelait « la bêtise au front de taureau ». C’est ainsi que nos révolutionnaires ont déclenché la Terreur. C’est ainsi qu’à la faveur de la crise du Covid l’inintelligence et l’inhumanité ont envahi les professions médicales et certains secteurs de la fonction publique. La croyance en une noble cause que l’on sert peut conduire, comme l’histoire l’a souvent montré, à commettre des horreurs. Refuser une greffe à une personne qui ne veut pas d’une injection expérimentale, ce n’est pas Auschwitz mais c’est une infamie quand même. Celui qui est capable de cela montre qu’il a perdu une partie de son humanité. De ce fait, il est engagé sur une pente à la faveur de laquelle, dans des circonstances adéquates, il pourrait en perdre le reste. Le nazisme n’est pas un phénomène différent. C’est un piège psychologique redoutable car il se referme lentement. Une propagande bien ciblée, une ingénierie sociale habile font prendre nos commandes par ceux de nos personnages intérieurs les plus manipulables.

 

C’est une héroïne de Bergman qui s’exclame (peut-être dans Crimes et chuchotements): « On ne m’a appris qu’à faire plaisir! » Tous ceux qui ont un projet sur nous et veulent nous façonner comme de l’argile exploitent entre autres ce besoin de faire plaisir, concomitant de la peur d’être rejeté, qui peut perdurer après l’enfance tant il a conditionné l’amour que nous recevions et le réconfort qui en résultait. Il est un des éléments intérieurs qui nous rend fragiles et malléables. C’est pour cela qu’entre autres choses demander à des enfants - seulement leur demander - de quel genre ils se sentent est une perversité. L’enfant n’a aucune idée des implications de la question et encore moins de sa réponse. Faute d’un choix qui ne peut s’exprimer qu’avec l’adolescence et le développement hormonal, il cherche à deviner la réponse qui ferait plaisir à l’adulte et finit par se couler dans le moule qu’on lui tend ou qu’il croit qu’on lui tend. Et l’on se retrouve avec des chirurgiens bien gras et les drames du Tavistock Institute. 

 

A ceux qui savent s’y prendre, nous pouvons être façonnables. Sur un plan plus ou moins futile, la puissance de la mode nous le démontre tous les jours. Nous ne manquons pas de faiblesses intérieures, de peurs, de frustrations, d’appétits, de paresses, par lesquels nous saisir et nous manipuler. Alain, philosophe athée, a cette phrase très forte: « L’âme, c’est ce qui résiste ». L’âme est ce qui nous alerte d’abord d’une dérive haïssable qui nous menace. Mais l’âme doit se se fortifier. J’ai un tempérament naturellement polémique, aussi, pour m’assagir, je médite souvent la prière de saint François d’Assise qui commence ainsi: 

«  « Seigneur, fais de moi un instrument de ta paix,
Là où est la haine, que je mette l’amour.
Là où est l’offense, que je mette le pardon.
Là où est la discorde, que je mette l’union. »

 

Chacun d’entre nous est une co-création. Nous ne sommes ni totalement les auteurs de nous-même ni entièrement le produit de la société. S’éduquer est peut-être agrandir notre part de co-création de nous-même. Mais, de nos jours, que produit notre co-auteur ? Quel genre d’humains l’incessante publicité télévisée prône-t-elle ? Quel genre d’humains la gestion de la crise sanitaire a-t-elle modelé ? Quelles animosités a-t-elle exacerbées ? Ne serait-il pas temps de reprendre tout cela ? Quand je contemple le gâchis qu’il y a en nous et autour de nous, combien nous nous sommes éloignés du vivant et de l’axe véritable de notre évolution, je me dis que, plus que de société, il s’agit aujourd’hui de civilisation. Selon moi, l’aboutissement d’une civilisation est de conduire l’homme à faire croître le meilleur de lui-même. Ce devrait même être le guide de toute construction sociale. 

 

* Lacombe Lucien, film de Louis malle (1974). Rejeté par les Résistants qui ne le jugent pas fiable, par dépit et désir d’aventure le jeune Lucien Lacombe rejoint la Collaboration.